
Nous venons de voir que la notion de temps pose souvent des problèmes. Ce problème est du à une mauvaise interprétation de la « fin des temps ». En histoire, le principal danger est l’anachronisme et parmi les différents anachronismes possibles, le plus dangereux est celui qui consiste à appliquer notre système de pensée à des individus d’autres civilisations et d’autres époques. Si nous voulons comprendre le sens des textes bibliques, il ne faut pas les aborder comme des occidentaux du XXIe siècle, mais chercher ce qu’ils signifiaient pour des Judéens du Ier siècle.
L’interprétation contemporaine et « l’eschatologie judéenne au Ier siècle ».
Actuellement quand on parle de « fin des temps », on pense à la destruction du monde matériel, au « jugement dernier », à la fin de « l’histoire terrestre ». Toutefois pour un Judéen du premier siècle, cette expression a un sens tout autre, que l’on perçoit d’ailleurs dans les évangiles.
La question des disciples
«Comme Jésus s’en allait, au sortir du temple, ses disciples s’approchèrent pour lui en faire remarquer les constructions. Mais il leur dit: Voyez-vous tout cela? Je vous le dis en vérité, il ne restera pas ici pierre sur pierre qui ne soit renversée. Il s’assit sur la montagne des oliviers. Et les disciples vinrent en particulier lui faire cette question: Dis-nous, quand cela arrivera-t-il, et quel sera le signe de ton avènement et de la fin du monde? » Matthieu 24 : 1-3
Il est intéressant de noter que dans leur question, les disciples lient trois évènements:
- la destruction du Temple (que vient d’annoncer Jésus)
- l’avènement de Christ
- la fin du monde
Cela n’est pas un hasard et traduit en réalité leur vision de la fin des temps, que l’on retrouve dans la question qu’ils posent à Jésus juste après sa résurrection :
« Alors les apôtres réunis lui demandèrent: Seigneur, est-ce en ce temps que tu rétabliras le royaume d’Israël? » Actes des apôtres 1 : 6
Dans la perspective judéenne, la fin des temps ne représente pas la destruction du monde, mais le rétablissement du Royaume d’Israël.
« Fin »
Aujourd’hui nous avons beaucoup de mal à comprendre cela à cause du mot « fin ». En français, lorsque nous utilisons ce terme nous pensons immédiatement à quelque chose qui se termine et qui donc ensuite n’est plus. Le « monde prend fin » veut dire que le monde est détruit. En réalité, le terme de « fin » serait mieux traduit par « aboutissement » ou « achèvement ». Lorsque les disciples de Jésus attendent la « fin » du monde, ils n’attendent pas sa destruction mais « l’aboutissement », « l’achèvement », c’est-à-dire la réalisation complète du but pour lequel il a été créé. Loin d’imaginer une destruction catastrophique, ils attendent donc au contraire un achèvement glorieux.
Le royaume d’Israël
Cette situation idéale, n’est pas une simple idée abstraite, mais se traduit pour tous les Judéens de l’époque par une attente très précise : « le rétablissement du royaume d’Israël ». Concrètement la royauté davidique sera restaurée, les Judéens habiteront la Terre Promise et obéiront aux lois de Dieu. Grâce à cela tout ira bien. Ils seront en paix et serviront de modèle aux autres nations qui auront reconnu que le Dieu d’Israël est le seul vrai Dieu. La Terre n’a donc pas vocation à être détruite, mais à être gouvernée par Dieu, par l’intermédiaire de son peuple.
Conclusion
Lorsque les auteurs bibliques, qui sont tous des Judéens du Ier siècle (à l’exception peut-être de Luc), parlent de la « fin des temps », ils n’envisagent donc pas une destruction de la Terre, mais le rétablissement du Royaume d’Israël.
Ce rétablissement a effectivement commencé à s’accomplir avec la destruction du Temple en 70, même s’ils ne l’imaginaient certainement pas ainsi.
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